Mahonia à feuille de houx

Le mahonia à feuilles de houx (Mahonia aquifolium), une plante semi-persistante originaire du nord-ouest des États-Unis, a été introduit en Belgique où il est aujourd'hui considéré comme une espèce exotique envahissante. Observé pour la première fois dans la nature belge en 1906, il s’est progressivement naturalisé. Souvent planté dans les parterres des espaces publics et privés, le mahonia s’est propagé dans les milieux naturels, en grande partie grâce à ses fruits, très appréciés des oiseaux, qui participent à la dispersion de ses graines.

EEE

Pour reconnaitre les EEE, n’hésitez pas à utiliser des applications telles que ObsIdentify (ou la version en ligne : www.observations.be) et à consulter la liste complète de la cellule IAS ou cette liste moins complète, mais plus visuelle de la Wallonie. Si vous désirez réaliser des plantations, vous pouvez vous référer aux listes de plantes indigènes du vademecum de YesWePlant, afin d’éviter toute nouvelle plantation d’EEE.  

En effet, les plantes indigènes sont plus favorables à la biodiversité que les plantes exotiques. 

Les Mahonias, un danger pour vos milieux naturels ?  

Les mahonias, un genre de plantes regroupant environ 70 espèces, s’étendent d'Asie orientale, d'Amérique du Nord et d'Amérique centrale. Ces plantes se distinguent par leurs feuilles épineuses persistantes et leurs petites fleurs jaunes en grappes, qui apparaissent principalement de mars à avril, mais parfois de novembre à mars selon les espèces. Ces fleurs sont très prisées des pollinisateurs. Après la floraison, elles donnent naissance à des grappes de fruits bleus, au goût acidulé, généralement appréciés des oiseaux, qui contribuent à la dispersion des graines par leurs fientes. À noter que toutes les parties de la plante, à l'exception de la chair des fruits, contiennent un alcaloïde toxique appelé « berbérine ».

(Anecdote : les fruits mûrs du mahonia appelés « raisins de l’Oregon » peuvent être transformés en gelée ou sirop une fois que les fruits ont été chauffés et les graines filtrées du mélange, car toxiques. Ils ont été selon certaines sources historiques, fermentés par les premiers colons sur le continent américain pour fabriquer un substitut de fortune au vin).  

Parmi ce genre, seul Mahonia aquifolium est repris dans la liste des plantes exotiques envahissantes en Belgique (Classe A2).

eee

Les différentes espèces de mahonias s’hybrident facilement entre elles, ce qui a conduit à la création de nombreux cultivars ornementaux. Ces hybrides, souvent utilisés dans les jardins, se développent plus rapidement que les espèces d’origine. En Belgique, on retrouve fréquemment des mahonias issus de croisements entre Mahonia aquifolium, Mahonia repens et Mahonia pinnata, toutes trois originaires d’Amérique du Nord.

Ces hybrides posent problème en raison de leur croissance rapide et de leur forte capacité à produire des drageons. Cela favorise la formation de tapis denses et mono-spécifiques, particulièrement envahissants dans les milieux protégés sensibles. En raison de leur impact écologique, nous parlerons des mahonias de manière générale dans la suite de cet article.

 

 

 

 

 

 

Carte des zones de présences et des zones à risque par le mahonia :https://www.provincedeliege.be/sites/default/files/media/10919/Mahonia%20faux-houx%20%28Mahonia%20aquifolium%29.pdf

(Tous les cultivars de mahonias, même non-envahissant peuvent donc entrainer la création de nouveaux hybrides potentiellement problématiques.)  

 

Mahonia
Mahonia au pied d'un houx indigène

Bien que, comme expliqué plus haut, les mahonias puissent présenter un certain intérêt pour les pollinisateurs grâce à leurs fleurs (intérêt toutefois controversé, car ils peuvent détourner les pollinisateurs des espèces indigènes) et pour les oiseaux via leurs fruits, ces impacts potentiellement positifs ne suffisent pas à contrebalancer leurs effets négatifs. Parmi ces derniers, on note notamment la compétition qu’ils exercent sur les espèces indigènes, mettant en péril la biodiversité locale. (Berberis aquifolium | Manual of the Alien Plants of Belgium, s. d.)

Les zones naturelles menacées par les mahonias se concentrent principalement sur les dunes côtières, où ces plantes forment des tapis denses qui étouffent la végétation locale. D’autres habitats sensibles, comme les forêts, les prairies naturelles et les falaises le long du sillon Sambre-et-Meuse, sont également impactés. En Gaume, bien que certains habitats soient potentiellement à risque, la présence des mahonias reste pour l’instant plus limitée que dans d’autres régions du territoire. (Invasive Alien Species in Belgium: Mahonia aquifolium, s. d.)

La prolifération actuelle des mahonias en Belgique et dans le reste de l'Europe est probablement aidée par le changement climatique, leur catégorie d’impact a d’ailleurs récemment augmenté (anciennement B2 maintenant A2).  

Maintenant que vous connaissez mieux cet EEE, comment gérer les mahonias si ces derniers sont présents dans votre commune ou votre jardin ?  

 

Des alternatives indigènes aux mahonias :  

Comme pour toutes les EEE, la première étape afin de limiter leur expansion est d’arrêter de les planter dans les espaces verts publics et privés. Cela peut se faire facilement en les remplaçant par des espèces indigènes ayant des caractéristiques horticoles similaires.  

  • L’espèce indigène la plus proche esthétiquement est le houx commun ( Ilex aquifolium ). Ce dernier a des exigences similaires aux mahonias, mais le houx peut devenir un arbre bien plus grand que les mahonias s’il n’est pas taillé. Des versions panachées du houx peuvent également apporter de la luminosité toute l’année dans le paysage.  
Mahonia

 

  • En milieu ensoleillé, l’ajonc d’Europe (Ulex europaeus) est également une très bonne alternative avec une floraison jaune fort similaire à celle des mahonias. D’autres bonnes alternatives peuvent être le genêt à balais (Cytisus scoparius), le cornouiller mâle (Cornus mas) pour leur floraison jaune ainsi que le lierre sous sa forme arbustive ( Hedera Helix 'ARBORESCENS').  
Mahonia

 

Excepté l’ajonc, toutes ces plantes font partie du Vademecum YesWePlant et peuvent donc faire l’objet de potentiels subsides.  

Gestion des mahonias faux houx  : 

La première question à se poser est : « Faut-il réellement mettre en place une gestion ? » Pour y répondre, il est important de prendre en compte deux facteurs : 

  1. Le milieu et les caractéristiques du site : Est-ce un milieu naturel protégé ou riche en biodiversité ? Le site est-il ouvert ou densément boisé ? 

  1. Le stade d’invasion : Combien de mahonias sont présents sur la parcelle ? Y a-t-il seulement quelques jeunes plantules, ou plusieurs plantes matures bien installées ? 

Il est crucial de se poser ces questions, car la gestion du mahonia, comme pour beaucoup d’autres EEE, peut se révéler complexe. En effet, après une coupe du tronc principal, les mahonias peuvent produire de nombreux drageons et rejets de souches. Leur gestion peut donc rapidement exiger beaucoup de temps et d’argent. 

Les mahonias étant déjà bien implantés en Belgique, il serait illusoire de tenter de les éradiquer complètement. Cependant, si ces plantes sont présentes dans votre commune ou votre jardin, une gestion peut être justifiée, notamment si vous êtes situé à proximité d’une zone dite « sensible ».  

 

  • Dans le cadre d'espaces verts ou de milieux naturels qui ne sont ni protégés ni d'une haute valeur biologique : 

une gestion peut être envisagée en fonction du stade d'invasion et des coûts associés, dans le but de limiter la dispersion de la plante. 

Pour les jeunes individus, la méthode la plus simple consiste à les déterrer manuellement, à l’aide d’une bêche. Il est important de repasser quelques semaines après pour s’assurer que les mahonias ne repoussent pas à partir d'un morceau de souche oublié. 

Pour les individus plus âgés, une coupe à la base, suivie de plusieurs passages espacés de quelques mois, peut permettre d'épuiser les réserves de la plante, entraînant ainsi sa mort. 

 

  • Dans le cadre de zones naturelles protégées ou riches en biodiversité :

une gestion est fortement recommandée, et si possible, dès que possible, afin de déterrer les jeunes plantules et ainsi éviter la dispersion par les graines. 

Mahonia
Jeune semis spontané de mahonia dans un jardin preuve de sa dispersion par graine

Si l'invasion est particulièrement importante et se situe dans un milieu difficile d'accès pour les machines, un traitement ciblé des feuilles avec un mélange de glyphosate à 5 %, lors d'une météo favorable, peut se justifier. Bien que cette méthode soit la plus efficace selon les dernières études, son efficacité semble varier en fonction de la nature du milieu, qu'il soit ouvert ou fermé. Le traitement des souches coupées avec du glyphosate a été testé, mais semble moins efficace que l'application

foliaire (Adriaens et al., 2019). L'utilisation de glyphosate nécessite une phytolicence et des justifications de la nécessité du produit dans le registre d’utilisation des PPP (produits phytopharmaceutiques). 

Dans la majorité des cas, un arrachage de la plante suivi d'un deuxième passage de vérification semble suffisant. 

 

  • Dans le cadre de jardins privés : 

l’idéal est d’enlever les mahonias manuellement à l’aide d’une bêche et de les remplacer par les alternatives indigènes mentionnées plus haut.  

Si vous avez d’autres questions sur sa gestion, n’hésitez pas à nous contacter

Mahonia
Pour conclure :  

Arrivé d’Amérique du Nord pour son caractère ornemental et sa facilité de culture. Il n’est aujourd’hui plus envisageable d’éradiquer les mahonias du continent européen. Ils font désormais partie de nos écosystèmes. Il est donc important de cibler les zones de gestion au moyen d’arguments écologiques et financiers. 

L’objectif est donc de protéger les milieux naturels sensibles (dunes, forêts, falaises) par la mise en place de zone tampon sans mahonias, mais également de limiter sa dispersion en les remplaçant par des alternatives indigènes dans nos espaces verts.  

La thématique des plantes exotiques envahissantes vous intéresse ? Si oui, n’hésitez pas à consulter nos catalogues de formations à destination de différents publics.  

Un article de Louis Noël, conseiller technique pour les professionnels.

Sources :